Yv

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Je lis, je lis, je lis, depuis longtemps. De tout, mais essentiellement des romans. Pas très original, mais peu de lectures "médiatiques". Mon vrai plaisir est de découvrir des auteurs et/ou des éditeurs peu connus et qui valent le coup.

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11 octobre 2017

Béthune est une petite ville, tout le monde s'y croise, se connaît, se fréquente, se toise, s'évalue. Du moins c'est ce que l'on ressent à la lecture de ce roman policier à l'ancienne fort bien mené ; les liens entre les personnages sont bien décrits, entre jalousie, amitié, simple fréquentation, tout y passe. Patrick S. Vast a su créer une atmosphère particulière qui donne le ton au roman : une herboristerie, magasin rare en France, pas ou peu de technologie -pas d'Internet, de portable, d'ADN, ...-ambiance rue de quartier, avec ses commerçants et ses passants, pour ceux qui connaissent, les images que ça me fait naître c'est cette vieille publicité Rue Gama. Mais évidemment, arrive le premier événement, l'étincelle qui va faire déborder le vase ou la goutte d'eau qui va mettre le feu aux poudres et la rue va s'animer.

Même le flic, le lieutenant Dumont travaille à l'ancienne, il se déplace beaucoup, pose des questions, écoute, voit et recoupe toutes les informations. On ne peut pas s'empêcher de penser à Columbo avec sa fausse naïveté et son non-moins faux dilettantisme. Patrick S. Vast déroule son histoire alors que nous connaissons nous le ou les coupables, et l'on se demande bien jusqu'où il va aller, jusqu'à quel point sa boule de neige va s’agrandir. L'enchaînement des événements paraît logique, fou mais logique et ces gens ordinaires se retrouvent confrontés à des situations extraordinaires qu'ils ne comprennent pas. Ils se révèlent alors dans leur veulerie, leurs faiblesses, leurs forces, leur courage, chacun réagissant différemment.

Un polar discret qui mérite d'être découvert, un peu comme les personnages qu'il met en scène et qui est doublement une bonne nouvelle. D'abord parce qu'il fait passer un très bon moment et change des polars trépidants en installant un suspense de bout en bout sans effet de rythme ou d'artifices et ensuite parce qu'il est le premier d'une nouvelle maison d'édition Le chat moiré qui propose des "polars psychologiques, d'ambiance, d'atmosphère" : ce n°1 est au format poche et à un prix accessible. Faites-vous plaisir !

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11 octobre 2017

Retour du Chat en pleine forme, dans un format classique de 48 pages. Tome 21. Je ne vais pas faire le même coup qu'à chaque fois que je commente un album de Geluck de vous répéter que je l'ai découvert il y a longtemps dans le Ouest-France de mes parents chez qui j'habitais encore et que je découpais les gags en trois cases pour les coller sur des feuilles puis sur le mur des ouatères... Ah, ben si, je vous ai refait le coup. Donc dire que j'aime beaucoup le chat est un euphémisme, et même lorsqu'il est un peu moins drôle, je suis indulgent. Ne voyez donc dans cette humble chronique qu'une ode à un personnage de BD. Ceci étant, en toute objectivité eu égard à ce que je viens de dire, l'album est très bon, Geluck s'offrant le plaisir de nous faire rire sur des situations pas drôles, tels les attentats-suicides ou les migrants de la Méditerranée. Dans ces cas-là, on rit un peu bizarrement, notamment un dessin sur les migrants qui nous fait ne pas nous sentir très à l'aise, nos richesses et notre mal de vivre montrés devant la détresse de ces pauvres gens qu'on est incapable d'accueillir dignement.

Pour le reste, Geluck reste fidèle à ses fondamentaux : absurde, détournement de mots ou d'expressions, moqueries du Français râleur et dépressif mais aussi du Belge schizophrénique ne sachant choisir entre la Wallonie et la Flandre. Geluck est drôle, il ne respecte rien et c'est pour cela qu'on aime ses BD. En plus, plus que jamais, Le Chat commande des muscadets, et moi, même si je n'en bois pas -sauf si un bon viticulteur me contacte en m'en fournit du bon, du bio si possible- bien que vivant en plein milieu des vignes de ce vin, eh bien, on a une petite fierté à voir qu'un produit du cru est apprécié par un personnage mythique, n'ayons point peur des mots.

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11 octobre 2017

Après "Les cobayes", je file le thème des essais pharmaceutiques, cette fois-ci aux Etats-Unis, c'est une coïncidence absolue, un effet secondaire des lectures, mais celui-ci n'est pas indésirable, bien au contraire. Si vous ne connaissez pas S. G. Browne, sachez que c'est le deuxième livre de lui que je lis, après l'excellent coup de cœur La Destiné, la Mort et moi, comment j'ai conjuré le sort et qu'encore une fois, il me ravit. Ce roman débute assez lentement avec un trentenaire un peu désabusé, un peu velléitaire voire un peu fainéant, pas vraiment investi dans sa vie, qui la subit plus qu'il ne la vit ; Lloyd vit avec Sophie depuis cinq ans qui lui demande d'arrêter son job de cobaye pour trouver un boulot plus sérieux et moins risqué, mais sans jamais vraiment s'opposer à elle il persiste à tester des médicaments et à faire la manche pour les à-côtés. Puis, lorsque les garçons s'aperçoivent qu'ils changent, le roman change également et d'un roman assez réaliste et classique, on passe à de la science fiction, un roman de super héros. Oui, mais comme c'est SG Browne qui écrit, évidemment, vous n'aurez pas droit à Superman ou Batman voire Spiderman, mais plutôt à des super héros aux talents assez étonnants que je vous laisse découvrir. C'est à la fois drôle, cynique, ironique et satirique. À travers ce délire romanesque, l'auteur dénonce notre société de consommation et particulièrement celle des laboratoires pharmaceutiques, des médecins qui prescrivent à tour de bras et notre rôle à nous patients qui acceptons tout et n'importe quoi pour aller mieux. Si la France est championne du monde de la consommation d’anxiolytique, les Etats-Unis doivent suivre de près et sans doute beaucoup d'autres pays riches, malheureux et envieux que nous sommes malgré toutes nos possessions.

Je ne suis pas très connaisseur de la littérature étasunienne, ni même amateur, mais lorsqu'elle se présente sous cet angle, je prends et en redemande. SG Browne est direct, il ne ménage pas ses propos, la critique est rude et tellement bien amenée que je ne peux qu'applaudir. Son thème favori étant celui qu'il a longuement déployé dans l'autre roman chroniqué sur le blog, à savoir, le sort, la destinée, le but de toute existence, la raison d'être, enfin toute la réflexion sur l'utilité de notre passage sur terre, le sens de la vie quoi, il en remet une couche cette fois-ci et Lloyd n'échappera pas à ces questionnements existentiels. SG Browne pousse parfois le bouchon, mais c'est bien, ça incite à la réflexion et il le fait tellement bien qu'on lui pardonne. En outre, lorsqu'au détour d'une phrase d'apparence sibylline, il place une banderille utile et réaliste telle que la suivante, que voulez-vous lui reprocher -la situation : une agression a lieu dans la rue, en pleine foule- : "Un des clients compose le numéro de la police tandis qu'un autre remplit son devoir de citoyen en filmant la scène avec son téléphone portable." (p.173) ? Tout est comme cela dans ce roman, pas un mot n'est ratable au risque de passer à côté d'un bon mot ou d'une pirouette à la fois drôle et profonde. Excellent, excellent, excellent.

Roman traduit, comme le précédent, par Morgane Saysana, et cette couverture d'un rose bonbon qu'on dirait un médicament, au dessin sobre et explicite, avec le bandeau maintenant célèbre des éditions Agullo, qui, contrairement aux autres, sert la couverture, en est une partie importante, pas juste une accroche marketing. Un très beau travail.

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11 octobre 2017

Les cobayes, ce sont Daniel, 44 ans, qui souffre de pertes de mémoire, Romain, 23 ans à la vie sexuelle difficile, un peu rapide dans ses ébats et Moïra, 26 ans, qui rêve des Beaux-Arts et qui est recalée à l'examen d'entrée. Ils vont, pendant trois semaines, et pour 3500 euros chacun, tester un nouveau médicament avant sa mise sur le marché, un anxiolytique qui aurait la bonne idée de n'avoir pas d'effets indésirables. Enfin, c'est ce que promet le médecin qui chapeaute le projet.

Bienvenue dans le monde des cobayes médicaux. L'ouvrage les présente comme des gens ayant besoin d'argent assez rapidement gagné, sans faire trop d'efforts mais surtout sans vraiment prendre en compte les risques pour leur santé. Je ne sais pas si c'est la réalité, mais l'évolution des effets est bien vue et les changements des personnalités d'abord à peine visibles, puis de plus en plus, sont très réussis. Dessin assez classique, avec quelques clins d’œil, on reconnaît des gens connus (FX Demaison en cobaye averti et expérimenté, le couple -ou ex- Brad Pitt et Angelina Jolie, ...), très agréable à suivre. Le scénario n'a rien à lui envier : le sujet n'est pas des plus faciles, et Tonino Benacquista y met un humour fort bienvenu, une légèreté qui rendent l'album vraiment plaisant. L'histoire se suit avec entrain et envie jusqu'au bout, un certain suspense est même présent à partir de la seconde partie. Une belle réussite.

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11 octobre 2017

"Il a chanté l'épouse modèle (Pénélope) et la veuve consolée (La fessée), la lolita (La princesse et le croque-notes) et la putain (P... de toi), célébré des femmes les charmes (Rien à jeter) et les épines (Si seulement elle était jolie). Jolies fleurs et peaux de vache sont présentes à égalité dans l’œuvre de Brassens. Mais lui, quel homme fut-il ? Un coureur de jupons ? Un fidèle absolu ? Une tendre canaille ? Un amoureux transi ?" (4ème de couverture)

Et oui, c'est vrai ça ? Que connaît-on de la vie de Brassens ? Assez peu de choses en somme, il n'est ni de la génération qui s'épanchait dans les journaux ni le genre d'homme à le faire. Brassens fait partie de ceux qui ont eu à accomplir des choses avant d'être connus et qui ont été reconnus pour leur talent alors qu'aujourd'hui, la mode est plutôt d'abord être connu pour éventuellement construire une carrière ensuite. Bernard Lonjon, sétois lui aussi, est un grand connaisseur du chanteur à moustache et c'est par le biais des femmes qu'il aborde cette biographie. Elles furent nombreuses à l'aimer, l'encourager et l'inspirer. Il les aima en retour, en premier lieu, sa mère, sa tante et sa sœur, puis les amoureuses, les amies du métier et d'autres métiers, les femmes de ses amis...

Bernard Lonjon explique comment et pourquoi naquit telle ou telle chanson, en référence à une femme pour qui Brassens avait du respect et de l'admiration ou tout au contraire, d'où ces textes parfois vaches et un peu misogynes (alors que d'autres ne le sont pas du tout, loin de là). Beaucoup d'extraits sont cités, qui font inévitablement venir en tête les mélodies, et c'est une très bonne idée, car écouter ou lire Brassens c'est bon pour les oreilles, les yeux et le cerveau. J'ai toujours apprécié les tournures de phrases, les beaux mots, les jolies manières de tenir des propos vaches, c'est quand même plus marrant de se faire égratigner, brocarder en chanson avec le talent de Brassens plutôt qu'insulter par un vague éructeur de mots comme on en entend aujourd'hui.