Six femmes au foot

Luigi Carletti

Liana Levi

  • Conseillé par
    10 juillet 2013

    Il s'agit d'un match très attendu car le Milan AC et l'Inter vont jouer. Le stade est comble, une foule humaine rassemblée pour assister à cet événement. Si les supporters des deux équipes sont présents, d'autre spectateurs comme ces six femmes sont là mais pas pour le match. Letizia, Lola, Annarosa, Renata, Guendalina, Gemma attendent autre chose.
    Annarosa accompagne son mari pour la première fois. Le foot, la foule : rien ne lui plaît. Le frère de son mari et sa femme sont là aussi. Les deux frères parlent foot et leurs épouses par solidarité féminine s'assoient l'une à côté de l'autre. Gemma est une habituée du stade. A plus de quatre-vingt ans, elle ne rate aucun match accompagné de la présence fantomatique de son mari. Lola chroniqueuse d'origine brésilienne va commenter pour la première fois à la radio et en direct ce match. Letizia est en mission particulière. Son but est un homme vêtu d'un blouson rouge et avec son équipe de police elle compte bien l'arrêter. Renata clouée dans un fauteuil roulant depuis son accident attend d'approcher un joueur en particulier. Et Guendalina, elle, veut se venger.

    Au fil des pages, on découvre plus en détail ces six femmes et leurs attentions. Des femmes qui se remettent en question, blessées, qui ont des secrets ou qui vivent avec la peur au ventre ou dans le passé. Presque toutes ont un plan pour parvenir à leurs fins mais rien ne ve se passer comme prévu.
    Si le roman prend au départ le tournant d'une comédie où les situations sont passées au crible avec un humour corrosif, Luigi Carletti nous entraîne très habilement dans le roman policier. C'est vif, sans temps mort, on sourit tant le regard de l'auteur est caustique et juste !
    Il nous dresse un portait de l'Italie d'aujourd'hui et la passion du foot n'est pas oubliée mais je vous rassure nul besoin d'apprécier ce sport pour se délecter de ce roman ! Seul petit bémol : j'ai trouvé que la fin était amenée trop vite.


  • 11 mai 2013

    "-Tu vois, Lola, le monde dans lequel nous vivons n'est qu'une vaste foire aux apparences. Chacun de nous, au fond, aimerait passer pour quelqu'un d'autre. C'est un mécanisme naturel, même les plantes et les animaux y obéissent. En général, on le fait pour améliorer son existence. Parfois, c'est une question de survie. Pour moi, c'est autre chose. Une mission. Je dois l'accomplir pour le bien de tous."
    Voici un roman époustouflant! Pourtant, le thème n'est pas vraiment en adéquation avec mes affinités de lecture.J'ai vraiment bien apprécié l'univers de ce roman. Première rencontre avec la plume de Luigi Carletti, qui a déjà publié en France Prison avec piscine, que je n'ai pas encore lu.


    La toile de fond c'est le huis clos brûlant du match Milan AC et l'Inter (non, ne partez pas...le foot en littérature offre de belles surprises). L'incipit du roman s'ouvre sur une ambiance lourde d'attente. Les deux équipes s'échauffent, les supporters soutiennent leurs équipes avec ferveur. Dans cette liesse, les femmes sont aussi présentes à leur manière: celles comme Annarosa qui suivent leur mari avec ennui, d'autres comme Renata, de ferventes admiratrices dont le rêve est d'approcher Materazzi, mais aussi Lola la chroniqueuse radio qui commente le match.On accompagne également Gemma, âgée de quatre-vingts ans. Elle a connu son mari Attilio au stade. Même mort, elle n'est jamais parvenue à le quitter et c'est tout naturellement qu'elle prend une place sur les gradins à son attention et continue à lui commenter le match.

    Ce roman dribble entre comédie et mystère et prend doucement le chemin du polar. Certaines femmes ne sont pas là pour le match, certaines sont en mission et observent les hommes, prêtes à tuer.

    Ce qui m'a particulièrement plu dans ce roman, c'est l'esprit de la tragi-comédie à l'italienne. La plume de Luigi Carletti est tour à tour élégante et satirique. L'auteur nous présente un concentré de l'Italie d'aujourd'hui: l'immigration mal digérée, les systèmes mafieux, la corruption...et cette formidable aptitude à rire de ce spectacle désolant.

    "Renata soupire et secoue la tête: l'amnésie de ce pays est un véritable handicap. C'est désolant, sur ce point, la gauche a raison, avouons-le: une nation sans mémoire est une nation sans avenir. Nous aurions donc tout oublié? Vraiment, plus personne ne se souvient de l'époque où, dans ce virage, on sifflait les joueurs noirs des équipes adverses? Et ces cris de singes qui fusaient, sonores, de toutes parts? On les voyait chanceler sous la bourrasque, et certains d'entre eux ne touchaient plus la balle. C'est fini tout ça? C'est du passé?"

    Roman machiavélique dont la vivacité du rythme vous emporte sur la voie d'un thriller.