La Fugue Théremine

Qui se souvient de Léon Thérémine, ingénieur russe au physique insaisissable,
d’une timidité maladive, sauf quand il s’agit de se produire sur scène pour
jouer de l’instrument qu’il a inventé, et qui finira par prendre son nom ? Ce
génie de la physique a tout simplement inventé en 1920 un instrument avant-
gardiste pour l’époque qui n’est toujours pas surpassé aujourd’hui. On joue du
thérémine sans même toucher à l’instrument, ce sont les ondes qui chantent,
c’est l’électricité qui hulule. Ce son venu d’ailleurs, ce son du futur
extraordinaire a été inventé par un homme dont le parcours individuel a lui-
même été hors du commun. Léon Thérémine a tout simplement traversé le XXe
siècle comme une onde, en épousant tous les grands événements, rencontrant
toutes les grandes figures de ce temps. Né sous le Tsar, mort sous Eltsine,
ancien soldat de l’armée rouge, bolchévique, Thérémine a rencontré Lénine, est
parti à la conquête des États-Unis avec son instrument, a connu la fortune… et
le goulag. Figure romanesque par excellence, dont on commémorera les 30 ans de
la mort en 2023, l’homme est ici le héros fascinant du roman de sa vie, entre
glorieuses années 1920 new-yorkaises et amours déçues à l’ombre de la crise.
Mais personne jamais en haut lieu n’oubliera de le rappeler à l’ordre
concernant sa mission.