Le Dernier Lapon

Olivier Truc

Anne-Marie Métailié

  • Conseillé par
    14 mai 2013

    Laponie, policier

    Dès les premières pages, me voilà plongée dans le Grand Nord Lapon. Et cette région, elle se mérite. D'abord par son vocabulaire, moi qui ne suis pas familière du vidda ni de l'élevage de rennes. Ensuite par l'organisation qu'elle demande : aucun des personnages ne part sans avoir des provisions pour une semaine (même s'ils ne partent que 2 jours).

    J'ai aimé l'aspect policier du roman, la recherche du coupable. Moins l'arrière plan, qui ne fait qu'ébaucher le chamanisme et les traditions lapones, à mon goût.

    Certes, on y apprend que le sous-sol du Grand Nord regorge de métaux précieux, mais la lutte sami est un peu laissée de côté.

    J'aurais aimé pleurer au départ du héros, malheureusement, je m'étais un peu perdue dans les descriptions géographiques.

    Au final, un roman qui, même si il a reçu le prix "Quais du polar 2013" n'aura pas su me toucher personnellement.

    L'image que je retiendrai :

    Celle du tambour sami, si mystérieux, mais qui peut encore être "lu".

    http://motamots.canalblog.com/archives/2013/04/26/26811471.html


  • Conseillé par
    10 avril 2013

    Une très belle réussite

    D'avoir fait un roman si lumineux dans une longue et terrible nuit, voilà le tour de force d'Olivier Truc. Un excellent polar qui intègre remarquablement la vie quotidienne du pays des rennes.


  • Conseillé par (Libraire)
    26 octobre 2012

    Une pépite !

    Polar nordique tonique et passionnant, "Le dernier Lapon" est un roman prenant, entre traditions et culture Samis, entre corruption et racisme, entre grands espaces et police des rennes, le tout pimenté d'un brin de poésie.


  • Conseillé par
    3 octobre 2012

    «C’était la journée la plus extraordinaire de l’année, celle qui portait tous les espoirs de l’humanité. Demain, le soleil allait renaître.»

    Après un séjour (très, très mouvementé) en Patagonie chez les nomades Mapuches de Caryl Férey, nous voici dans le Grand Nord chez les Samis.

    Le peuple Sami est un peuple nomade, éleveur de rennes en Laponie.
    La religion samie pratique le culte des ours et le chamanisme.
    Le chant Joik traditionnel se chante a cappella, sorte de plainte, de cri de douleur ou de colère. Chant improvisé.


    Les premiers missionnaires le qualifie de chant du Diable.
    Ce chant est accompagné par un tambour magique fabriqué à partir d’une peau de renne.
    Les Samis peuvent alors entrer en transe pour rejoindre leurs dieux ou leurs ancêtres.
    Les Samis vivent dans une sorte de tipi nommé «gumpi».
    Voilà, ça c’est fait, c’était la minute nécessaire du Professeur d’ethnologie.

    Passons au vif du sujet comme dirait Roger Frison-Roche, notre célèbre explorateur français.
    (Tiens du coup, je me revois enfant dévorant «Premier de cordée» avant d’aller me jeter dans les pattes de «Michel Strogoff» de Jules Verne...quand tu aimes, il faut partir écrivait Blaise Cendrars...)

    Klemet Nango est policier à la Brigade des rennes, patrouille P9.
    Klemet est sami. Il est le seul sami policier. Pas très loin de la retraite.
    Il travaille en doublette avec Nina, jeune diplômée de l’école de police d’Oslo. Boursière, elle n’a pas eu le choix de son affectation. Elle ignore tout de ces contrées dépeuplées et semi-désertiques du Nord mais...elle a de grands yeux bleus.
    La police des rennes gère les conflits entre éleveurs : vols de rennes, partage de territoires de transhumance, constats de rennes accidentés.
    La routine quoi.

    C’est encore la longue, longue nuit polaire...
    Quand, quand...

    Quand un précieux tambour magique sumi vient d’être volé dans le musée du centre culturel de Juhl.
    Quand Mattis un éleveur de rennes vient d’être sauvagement tué : poignardé, les deux oreilles découpées.
    «Tous les rennes sont marqués aux oreilles. Aux deux oreilles. Et tu as besoin des marques des deux oreilles pour identifier le propriétaire. Les voleurs coupent les oreilles des rennes.
    Pour qu’on ne puisse pas identifier à qui appartient le renne. Pas de propriétaire, pas de plainte.»

    Par moins trente degrés, à cheval sur leurs scooters des neiges, Klemet et Nina vont enquêter...et nous faire visiter la Laponie.
    Extraordinaire Laponie !
    Et au fil de la lecture le temps d’ensoleillement va augmenter pour finir par éclairer le dénouement.
    4H15 mn d’ensoleillement...4H38 mn d’ensoleillement...

    Les suspects ne manquent pas.
    Une histoire sordide de vendetta entre éleveurs ?
    Qui est vraiment ce Mattis, fils de chamane, fabricant de tambours samis ?
    Et que dire de cet Aslak qui vit retiré du monde dans la toundra, dans une tente de branchages, de terre et de mousse avec ses rennes et sa femme. Cet Aslak qui se déplace encore en skis, combat les loups à mains nues et castre ses rennes avec les dents.

    «Tu vois, ces montagnes, elles se respectent les unes les autres. Aucune n’essaye de monter plus haut que l’autre pour lui faire de l’ombre ou pour la cacher ou pour lui dire qu’elle est plus belle...Les hommes devraient faire comme les montagnes.»

    Et que vient fouiller ce géologue français ?
    Vient-il réveiller une vieille légende sami qui prétend l’existence d’une mine d’or secrète ?
    Secrète mais...maudite !

    Et que manigance ce nouveau parti d’extrême droite qui monte en puissance dans le pays ? Le soi-disant Parti du progrès.
    Et que penser de ce Rolf Brattsen, policier raciste qui déteste les Samis.
    Une histoire politique ?
    De gros sous ? De pétrole ?

    Et que dire de cet Olaf Renson, jeune enragé autonomiste sami qui lutte pour la survie de son peuple ?

    Et que protège ces laestadiens, cette secte luthérienne, et leur pasteur fanatique ?

    Et pourquoi Karl Olsen, ce riche paysan, cache t-il cette précieuse carte relatant une expédition dans le Grand Nord de Roger Frison-Roche en 1939 ?

    Et que...

    Oui, cher lecteur, vous le saurez en lisant ce superbe «thriller-boréal».

    Klemet et Nina sont deux personnages très attachants.
    Vraiment. On se sent bien près d’eux.
    Les paysages lapons sont magnifiques. Les moeurs de ces Samis, éleveurs de rennes sont remarquablement décrits.
    La construction de l’histoire est parfaitement maîtrisée.

    Un excellent moment de lecture.
    Dépaysant !
    Superbe !

    Olivier TRUC est journaliste : Libération, Le Point, le Monde.
    Spécialiste des pays nordiques et baltes, il vit à Stockholm.
    C’est son premier roman.

    «Il savait ce qu’il devait faire. Et ce que, après lui, son fils devrait faire. Et le fils de son fils.»


  • Conseillé par
    17 septembre 2012

    Polar dans le froid extrême

    Je préfère prévenir en préambule, je risque de m'emballer de me laisser aller à de la dithyrambe. J'ai un vrai coup de coeur pour ce polar nordique -on ne pourrait plus- écrit par un Français connaissant bien la région, puisqu'il vit en Suède.

    D'abord l'écriture est très simple : phrases courtes, efficaces allant droit au but. Pas d'effet de style, c'est basique -là, c'est un compliment- sans fausse note, sans faute de goût.


    Ensuite, la région est formidablement décrite, entre les montagnes éternellement blanches, les lacs gelés, les tentes lapones, les élevages de rennes, ... ça donnerait presque envie d'y aller. De fait, ça accentue mon envie de visiter ces régions froides : je suis beaucoup plus tenté par la visite du nord de l'Europe que par celles chaudes et ensoleillées du sud. Olivier Truc est donc pour moi un tentateur. Le temps de chausser mes bottes et ma chapka et je suis -presque- prêt à partir.

    Puis, les personnages sont bien campés, bien décrits. Olivier Truc dresse toute une galerie : le Lapon fier et combattant pour la reconnaissance de son identité, celui qui ne sait plus s'il est vraiment un Lapon ou un Suédois (Kelmet, le flic), celle qui prend fait et cause pour eux (Nina, l'autre flic) et les racistes en tout genre qui ne sont pas l'apanage de la Suède, on a tous autour de nous des crétins de ce genre. Pas de caricature c'est malheureusement une triste réalité que l'auteur décrit, entre une montée des revendications pour une reconnaissance des minorités et l'envolée des thèses racistes et de défense d'une civilisation qui serait "supérieure" : "Les Samis sont la dernière population aborigène d'Europe. La façon dont on les traite et dont on traite leur culture et leur histoire, en dit long sur notre capacité à appréhender notre histoire." (p.134) Je ne connaissais rien des Samis ou des Lapons. Je ne savais pas à quel point ils avaient été eux aussi persécutés par les pasteurs protestants afin de renoncer à leurs pratiques rituelles et épouser la religion. "Pendant des décennies, les pasteurs suédois, danois ou norvégiens nous ont pourchassés pour confisquer et brûler les tambours des chamans. Ça leur faisait peur. Pensez donc, on pouvait parler avec les morts ou guérir. Ils en ont brûlé des centaines, des tambours." (p.41) Je ne savais pas non plus qu'ils faisaient toujours l'objet d'un racisme quotidien, d'une sorte de complexe d'infériorité. Certains d'entre eux sont encore marqués par cette religion qui les a brimés, les a empêchés de vivre selon leurs principes et préceptes. Certains sont toujours sous la coupe de l'église ou de la secte laestédienne, puisque leurs parents ou grands-parents ont été convertis par le pasteur Lars Levi Laestaddius lui-même ou par ses disciples (voir ici et là deux liens vers des articles concernant cette religion et les hommes censés la faire appliquer, dont un article signé Olivier Truc).

    Enfin, l'intrigue ou devrais-je dire plutôt les intrigues. Il est malin Olivier Truc. A la manière des polars nordiques très en vue ces dernières années, son héros de flic va lentement : "Mais moi, j'avance sur des faits. Et ça prend du temps. Si tu veux de l'action, va donc rejoindre Brattsen, il est moins pointilleux que moi. Il arrête d'abord, il pose les questions après. J'avoue, j'ai tendance à prendre les choses dans l'autre sens." (p.326). Plusieurs pistes s'ouvrent à lui, il les suit. Il n'est pas persuadé que le vol et le crime soient liés, il vérifie donc tous les indices. Quitte à se dédire ensuite si les faits prouvent le contraire de ce qu'il croyait. Il est tenace et sa collègue itou. Elle le soutient, le seconde et parfois même le devance dans ses déductions. M'étonnerait pas qu'ils reviennent pour d'autres aventures ces deux-là ! Parce qu'en plus, Olivier Truc, il lâche des bribes sur leurs vies personnelles, mais rien de trop, juste de quoi appâter le lecteur -et ça marche, je suis sans doute une proie facile, mais je ne dois pas être le seul à m'être fait prendre.

    Un bonus supplémentaire pour la toute fin que je ne raconterai pas évidemment -même sous la torture, je ne dirai rien. Niet ! Nada ! (je me mets à la langue, une partie de la Laponie est russe). Très bien vu donc ce final qui appelle une suite et qui ne mâche pas tout le travail : le lecteur est mis à contribution.

    Vachement -rennement plutôt- bien ce polar dans lequel en plus de suivre une passionnante enquête on apprend plein de trucs (pardon Oliver, mais j'étais obligé. On a dû vous la faire dix mille fois, mais moi, c'est la première. Suis-je pardonné ?). Moi, un polar qui m'instruit et me distrait, non seulement je dis oui, mais en plus je vous le conseille très très fortement.